Le coaching solidaire : tout le monde a le droit d’être accompagné

Le coaching solidaire : tout le monde a le droit d’être accompagné

Activité de l’entreprise ralentie, stress financier, incertitude… Comment trouver la force de rebondir ? Antoine Parmentier, Président d’EMCC-Belgium, nous parle des vertus d’un coaching, qui se veut solidaire.

Stress et finances : un duo qui pollue la tête

Dans le cadre du programme Restart de Beci, dédié à l’accompagnement d’entrepreneurs qui ont vécu une faillite, Antoine Parmentier anime des Groupes d’Échange et de Développement (GED). Il s’agit d’un coaching collectif, basé sur une démarche de « co-développement » : face au choc de la faillite, les participants échangent leurs expériences, leurs ressources et s’épaulent mutuellement. Depuis le début de la crise sanitaire, deux groupes différents ont été accompagnés successivement, lors de réunions bimensuelles.

Antoine animait le GED de la première « promotion Covid », d’août à décembre 2020. Petite rétrospective. Durant la période de déconfinement (septembre-octobre), les réunions se déroulent en présentiel. L’animateur constate très peu de différence avec les groupes antérieurs à la crise. A ce moment, il n’est pas encore question de deuxième vague, le climat est à la réouverture, on l’espère… Le reconfinement de novembre renvoie soudain les participants derrière leurs écrans. Mais le stress n’explose pas pour autant. Les difficultés sont plutôt d’ordre technique : fracture numérique, mauvaise connexion…

L’impact commence à se faire sentir dans la seconde « promotion Covid » (janvier-avril 2021), particulièrement, sur le plan psychologique : excès de stress, anxiété, perte de sens, isolement… Submergés par leurs préoccupations – principalement financières – les participants peinent à se rendre disponibles pour le groupe : « Les problèmes sont tellement présents dans leur tête, que cela parasite leurs pensées… », explique Antoine. Le télétravail amène aussi son lot de complications : à l’inévitable confusion entre vies professionnelle et privée, s’ajoutent ces questions existentielles : comment développer une activité quand on est (semi)confiné ? Comment faire du démarchage avec un masque ? Sans compter la peur de la contamination, encore très présente pour beaucoup.

Le stress financier ne se contente pas de « polluer la tête » ; il peut aussi entraver la participation aux réunions. Un petit boulot se présente ou un entretien d’embauche… L’espace de parole, d’une durée de deux heures, devient alors une « perte de temps » et donc d’argent. Dans ce cas, la gratuité de Restart n’est plus synonyme de motivation. Le rôle primordial de l’animateur est alors de créer un lien de confiance entre les participants : « La force du programme, c’est le groupe. Si tout le monde venait les mains dans les poches, il ne se passerait rien. La grosse difficulté est de créer un lien d’engagement collectif, un engagement autre que financier. »

Un processus de co-développement

Pour retrouver confiance, en soi et en son projet, il n’y a pas de recette « clé sur porte ». Cela ne peut se faire seul, à la maison. Il s’agit d’un processus, inscrit dans la durée. En Groupe d’Échange et de Développement, on travaille principalement sur la courbe du deuil et la résilience. Dans un premier temps, le participant est invité à changer sa vision de la faillite, à ne plus s’identifier à celle-ci. Ce qui nécessite d’abandonner la croyance erronée que « parce que j’ai failli, je suis nul. » Se détacher de l’événement, permet de se retrouver en tant que personne et de voir les choses autrement : « Sans nier toutes ses conséquences dramatiques, que puis-je retirer de la faillite pour rebondir ? »

Arriver à cet état d’esprit demande du temps. Et le soutien du groupe est inestimable : rencontrer des gens qui traversent des épreuves similaires (voire plus pénibles), permet de relativiser ce qui arrive et d’en tirer les leçons, pour reconstruire.

A propos de résilience, Antoine Parmentier conclut : « Derrière une difficulté, il y a toujours un cadeau caché. Même si parfois il ne sera jamais à la hauteur de l’événement. Or, quand on est au milieu du choc, on n’est pas en état de le voir… La fonction du coaching (individuel et collectif) est d’aider la personne à se rendre disponible pour trouver ce cadeau caché. ‘La résilience, c’est faire de l’épreuve un cadeau’ nous dit Patrick Dugeoit. »

Un coaching ? pour quoi faire ?

En période de crise et face à l’incertitude qu’elle génère, pourquoi passer du temps à réfléchir avec un coach ? Alors que vous vous démenez pour joindre les deux bouts, quand chaque minute compte et que votre entreprise semble vous échapper, pourquoi choisir ce moment-là justement, pour s’arrêter et faire le point ? Voici, succinctement, quelques éléments de réponse.

  • LA POSTURE DU COACH. Le coach est un professionnel qui ne vous connaît pas (ni vous ni votre projet) et que vous ne connaissez pas non plus. Il a donc une posture qui vous autorise à être entièrement vous-même, sans risquer de vous sentir jugé. De plus, cette personne est entièrement disponible pour vous.
  • L’ÉCOUTE. Le coaching vous propose un espace et un cadre sécurisé, où vous pouvez déposer tout ce qui vous préoccupe. Le fait d’être écouté dans vos difficultés vous permettra d’être ensuite plus disponible pour envisager les solutions.
  • PRENDRE DU RECUL. Le coach vous aide à « dégrossir » la situation, à démêler la pelote de vos tracas, en tirant un à un les fils. Sur base de votre récit et en posant des questions, il vous invite à regarder votre situation de manière globale : les blocages mais aussi les choses qui fonctionnent. Ce cheminement vous amène à retrouver vos ressources, vos appuis.
  • DES PISTES D’ACTIONS. Toujours à partir de ce que vous apportez comme informations, et de qui vous êtes, le coach vous aide à faire émerger des pistes d’actions concrètes.
  • UNE CHOSE À LA FOIS. Après avoir listé les actions possibles, le coach peut vous pousser à les structurer et à les séquencer dans le temps. La précipitation est mauvaise conseillère ; mieux vaux procéder par étapes.
  • GÉRER LE STRESS FINANCIER. Le coach vérifie avec vous le degré d’urgence financière. Si vos besoins vitaux sont mis à mal, il vous aidera à réfléchir aux protections que vous pouvez mettre en place comme, par exemple, contacter les services sociaux adéquats. Si l’urgence est relative, le coach peut vous aider à décoder votre relation à l’argent et à la réajuster, selon vos priorités.
  • TRANSFORMER LA CRISE EN OPPORTUNITÉ. L’incertitude financière peut vous amener à faire le point sur votre motivation, vos priorités, votre potentiel et… vos limites.
    Serait-ce le moment de vous poser la question « Qu’est-ce qui est important pour moi aujourd’hui ? ». Le coach peut vous guider dans ce repositionnement, vers plus de clarté pour rebondir.
  • LA CONFIANCE EN SOI. Par l’écoute et le feed-back sur votre parcours, le coach vous invite à vous reconnecter à vos compétences, vos qualités, vos talents. Vous sentirez alors peut-être le besoin de suivre une formation complémentaire, pour optimiser la relance de votre entreprise. Afin d’équilibrer vie privée et professionnelle, il peut être utile de planifier avec lui des moments réguliers pour vous ressourcer. Autant de démarches qui boostent votre énergie et renforcent votre confiance en vous.
  • TROUVER LE COACH QU’IL VOUS FAUT. Chaque coach a sa propre méthodologie, qu’il adapte selon sa personnalité. Il est important que le courant passe bien entre vous ; que vous vous sentiez en confiance et à l’aise avec sa manière de travailler. Si vous appréciez les techniques plus corporelles, telles que les jeux de rôles ou la méditation, par exemple, certains les intègrent à leur pratique… Attention, dans tous les cas, choisissez un coach professionnel, c’est-à-dire et entre autres, un coach qui :
    • a suivi une formation spécifique au coaching ;
    • souscrit au code de déontologie d’une fédération reconnue (EMCC, ICF…) ;
    • peut témoigner d’une pratique continue du coaching ;
    • est régulièrement supervisé.

L’équipe solidarity

Antenne belge de la European Mentoring & Coaching Council, EMCC-Belgium est une association ouverte à tous les professionnels actifs dans la pratique du coaching. Plateforme de rencontres et d’événements, elle apporte aussi une crédibilité au métier de coach.

En 2017, le programme Restart de Beci, dédié à l’accompagnement d’entrepreneurs en faillite, demande à EMCC-Belgium l’intervention de coachs bénévoles, en soutien aux restarters [1].

EMCC relance alors le « coaching solidaire », destiné aux personnes ou associations ne disposant pas de moyens suffisants pour financer un coaching.

Outre la qualité professionnelle de ses membres, EMCC s’appuie sur une philosophie essentiellement humaniste, visant à rendre le coaching accessible au plus grand nombre. L’association fonctionne sur un mode participatif : chaque membre s’engage à donner minimum 15 heures de son temps par an. Ce temps bénévole est consacré au fonctionnement de la structure sur différents plans ; le coaching solidaire en fait partie.

En septembre 2021, EMCC clarifie son offre de services et décide de développer le pôle « coaching solidaire ». Sous l’impulsion dynamique de Caroline Henricot, coordinatrice du projet, un noyau de 7 coachs se porte volontaire : l’équipe Solidarity est née.

Le projet Solidarity s’adresse à deux types de public :

  • Toute personne ayant besoin d’un accompagnement et qui n’en n’a pas les ressources financières (estimées à 1.000 € par mois). L’accompagnement s’adresse en priorité aux personnes en recherche d’emploi, aux stagiaires et aux étudiants boursiers. Afin de garantir leur engagement dans le processus, une participation libre et consciente leur est demandée.
  • Les associations à vocation sociale forte au bénéfice de personnes résidant en Belgique. Dans ce cas, le coaching est proposé à deux publics différents, en lien avec le partenaire :
    • à ses travailleurs bénévoles. Le coaching du personnel rémunéré restant de la responsabilité de l’employeur.
    • aux bénéficiaires de son activité.

A ce jour, sur les 150 membres d’EMCC, environ 80 coachs ont montré leur intérêt pour donner au minimum un coaching solidaire par an. Des coachings « directs » sont en cours ; l’association est maintenant à la recherche d’autres partenaires, en plus de Restart (Bruxelles).

 

Valérie Decruyenaere
Chargée du projet 7 Jours Santé

D’après l’interview d’Antoine Parmentier, Président d’EMCC-Belgium
Avec la collaboration de Mathieu Seron, Consultant, coach et formateur indépendant

 


[1] Dans le cadre de Restart, chaque participant au programme a droit à 5 séances (1h30) gratuites d’accompagnement individuel, avec un coach professionnel.

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