Comment prévenir l’impact du stress sur l’immunité ?

Docteur Preat

Médecin généraliste depuis 40 ans, le docteur Préat a décidé d’ajouter à sa pratique, les médecines naturelles : l’acupuncture, l’homéopathie, la phytothérapie et la nutrithérapie. La combinaison de ces deux approches de la santé (médecine classique et alternative) lui permet de diminuer la consommation de médicaments et de proposer à ses patients un maximum de remèdes naturels. Mais elle reste avant tout généraliste. Le docteur Préat est également enseignante à l’Institut d’Hygiène et de Médecine Naturelle (IHMN) et secrétaire de la SBPN, la Société Belge de Nutrithérapie et Nutrition.

Dans la continuité de l’article « Choisir une alimentation anti-stress pour renforcer l’immunité », nous lui avons demandé son point de vue sur l’impact du stress sur nos défenses naturelles.

Dans le contexte de crise sanitaire, avez-vous ressenti un excès de stress chez vos patients ?

Bien sûr. Et cela continue. Au tout début de la crise, c’était surtout du stress. Maintenant ce sont les burn-out. Au début (mars à juin 2020), le stress par rapport aux nouvelles contradictoires, angoissantes, de contagion, de confinement… Par rapport au vécu du télétravail : s’organiser avec la famille, les enfants qui n’allaient pas à l’école…

Comment le stress s’est-il transformé en burn-out ?

C’est la durabilité de la crise qui a conduit les gens progressivement au burn-out. Pour le moment c’est fatigue, fatigue, fatigue… Ce burn-out peut être professionnel ou familial. Certains enfants eux-mêmes sont en dépression. Pour les ados de 15-17 ans qui ont été privés de leurs contacts sociaux, cela a été très pénible. Je me suis rendu compte que malgré qu’ils soient connectés aux médias sociaux, la rencontre « physique » reste essentielle.

Quel a été l’impact du stress sur la santé physique et mentale ?

Santé mentale : la durée de la crise a eu un impact mais sa gestion a aussi suscité des questionnements éthiques : est-ce que cela a été bien géré ? N’a-t-on pas exagéré l’anxiété ? Les règles sont-elles adaptées à la gravité ? Aurait-on pu relâcher la pression à certains moments ?
Mais avant tout, ce que les gens n’ont pas supporté c’est le stress continu et parfois une incompréhension des mesures par rapport à la santé : on transmettait des messages de danger en continu.

Santé physique : le stress produit du cortisol via les glandes surrénales. L’excès de cortisol provoque de l’excitation, des troubles du sommeil, de l’hypertension… et diminue l’immunité. En cas d’épidémie, renforcer son système immunitaire est très important. Or, dans les messages sur la crise, on a très peu parlé d’immunité. Par exemple, l’activité physique, contribue à une immunité forte. D’autant plus si elle est combinée aux contacts sociaux. Mais les salles de sport étaient fermées…

Pourriez-vous rappeler brièvement comment fonctionne le stress par rapport à l’immunité ?

Le cortisol est une hormone qui permet à l’organisme de répondre au stress dans l’immédiat : l’organisme déclenche le mouvement pour se défendre (les muscles s’échauffent, la tension augmente…) ; il utilise le magnésium pour que les muscles s’activent. Or, le stress – a fortiori de longue durée – provoque une très grosse chute de magnésium. Pour une bonne immunité, on a besoin d’oligoéléments comme le magnésium, le zinc… ainsi que de la vitamine D.  Or, beaucoup d’activités sportives de plein air, qui permettent d’intégrer la vitamine D et d’évacuer le stress étaient supprimées (ex. les marches Adeps). Donc, l’immunité a été directement affectée par l’excès de cortisol qui déséquilibre et épuise l’organisme.

L’organisme s’épuise aussi parce que le stress dure…

Oui. On parle de « burn-in » et de « burn-out ». Le burn-in c’est quand on surutilise son cortisol, c’est la phase de cortisol élevé, visible dans une prise de sang. Après un certain temps de cette surconsommation de cortisol, celui-ci chute. Et ça, c’est le burn-out. C’est la phase dans laquelle nous nous trouvons maintenant. Le cortisol puisé pendant un an et demi est maintenant au plus bas. Ce déséquilibre du cortisol (excès suivi d’une chute) induit des dysfonctionnements immunitaires.

Avez-vous aussi croisé des gens qui ont bien vécu le confinement ?

Seules deux patients m’ont dit préférer le télétravail, mentionnant l’inconvénient des trajets et des sollicitations trop fréquentes de collègues sur le lieu du travail. Mais ce n’est pas la majorité. En règle générale, la plupart sont plutôt favorables à la reprise du contact social.

Que leur conseillez-vous pour atténuer le stress ?

Comme je pratique les médecines « complémentaires » depuis longtemps, mes patients sont habitués à ce que je leur parle d’alimentation vivante et équilibrée : diminuer les sucres, augmenter les fruits et légumes… Je les ai bien sûr encouragés à poursuivre ces bonnes pratiques durant le confinement. Mais ce qui était le plus difficile à conseiller était l’activité physique puisque tout était fermé. Ceux qui avaient l’habitude de marcher en groupe, par exemple, étaient démotivés à l’idée de marcher seuls.

Le contact social peut-il réduire le stress ?

Si la relation est fluide, oui, bien sûr. A ce propos, voici une anecdote : en plein confinement strict (un seul contact rapproché autorisé), une de mes patientes, privée de ses enfants et petits-enfants, se sentait très seule. Ses activités bénévoles avaient cessé… Je lui ai fait une ordonnance, lui prescrivant d’aller deux fois par semaine prendre une tasse de café avec une amie « fixe ». Je lui ai dit « Vous devez vous déplacer et voir la personne. » Elle l’a fait et m’a dit ensuite « Vous aviez raison, ça change du téléphone. »

En bref : une alimentation saine et équilibrée, avec un minimum d’activité physique et de vie sociale ?

Oui. Je les ai encouragés au maximum à faire les choses autorisées et à se le permettre.

Que conseillez-vous aux entrepreneurs pour renforcer leurs défenses naturelles ?

  • Avoir une bonne hygiène de vie : se promener, pratiquer une activité physique et/ou de détente, dormir suffisamment et choisir une alimentation équilibrée.
  • Veiller à ne pas manquer de : vitamine D, zinc, sélénium, vitamine C et magnésium. Le magnésium participe à toutes sortes de mécanismes de défense et, comme je l’ai déjà évoqué, il est surutilisé par l’organisme en cas de stress. Je donne du magnésium à pratiquement tous mes patients pour le moment, pour rehausser leur résistance au stress mais aussi pour leurs défenses immunitaires.
  • Prendre soin de son microbiote : le grand oublié et qui fait partie de toutes les études.

Il y a des cellules immunitaires dans l’intestin. Finalement les microbes et les virus, on les respire mais on les avale aussi. Une personne qui ne mange pas sainement, qui consomme beaucoup de sucre a moins d’immunité. Il y a un lien clair entre le microbiote et l’immunité.

Si l’on veut renforcer son système immunitaire, il faut faire des petites cures discontinues d’un bon mélange de probiotiques. Il est essentiel de penser à son intestin. Parmi les patients qui ont eu le covid, beaucoup ont eu des troubles intestinaux longtemps après. Je leur ai prescrit des probiotiques. De manière générale, tout patient qui a été traité par antibiotiques devrait recevoir des probiotiques ensuite.

  

Propos recueillis le 18 juin 2021, par Valérie Decruyenaere, Chargée du projet 7 Jours Santé